Buggy Apal à motorisation Renault

Buggy Apal à motorisation Renault

Où en sont les belges ?

(Reproduction de l'article publié dans le Patriote Illustré

n °3 du 21 janvier 1968)






Problèmes de construction


Depuis feu la Minerva, il n'existe plus de marque belge de voiture, ou plutôt il n'y a plus d'usines de voitures intégralement belges. Il s'agit là probablement d'un phénomène irréversible, encore que nous n'osions pas jouer les prophètes en ce domaine.

Même les firmes qui se consacrent à la production de véhicules utilitaires sont obligées d'acheter à l'étranger à tout le moins les moteurs dont elles équipent leurs camions, leurs autocars ou leurs bus.

Dans ces cas là évidemment, l'apport étranger ne représente qu'une faible partie de la valeur du véhicule. Ce qui en fait le prix et souvent l'originalité est de conception et de fabrication belge; Et il faut croire que nos constructeurs peuvent rivaliser en toute quiétude avec les meilleurs étrangers, puisque l'essentiel de leur production s'écoule sur les marchés extérieurs.

Ainsi des autocars (principalement) et de s autobus construits pard des firmes comme Van Hool et Bus and Carc trouvent preneurs jusqu'aux Etats-Unis.

Quelques chiffres pour en terminer avec cette rubrique : en 1965, notre pays a importé 61 autocars et autobus et en a exportés 1513 ! D'autre part, la Belgique, dans ce domaine, est son principal fournisseur puisque sur les quelques 9000 véhicules qu'elle possède, près de 50% ont été construits chez nous.

Dans le domaine des voitures la situation est loin de se présenter aussi favorablement. Nous n'avons pas en Belgique l'équivalent de la Daf hollandaise. Celle-ci a pu naître grâce à l'aide apportée par le gouvernement de La Haye (qui lui a confié après la Libération le soin de produire des camions militaires dont le pays avait besoin, en lui laissant toute latitude pour acquérir l'expérience nécessaire), tandis qu'en Belgique, il semble que la construction en grande série d'une voiture nationale soit considérée en haut lieu comme superflue et indigne d'une utilisation - lâchons le mot - patriotique des crédits militaires.

Il n'y aurait rien, absolument rien, si quelques rares constructeurs indépendants n'avaient relevé le gant. Deux marques viennent à l'esprit de ceux qui savent : Mean et Apal, cette dernière pouvant se prévaloir depuis 1962 de la construction d'une centaine de coupés 2+2 en fibre de verre équipés de mécaniques VW ou Porsche, et plus récemment d'un véhicule utilitaire du genre tout terrain. Cette firme liégeoise présente cette année, en première mondiale, sa nouvelle GT qui est une très réelle nouveauté.




Une naissance n'est pas le fruit du hasard


Cette GT, que le Patriote Illustré présente en exclusivité mondiale a ses lecteurs n'est pas née n'importe où, ni n'importe comment.

La firme Apal ( entendez Applications Polyester Armé Liégeois) a acquis une expérience déjà longue dans le traitement du polyester, ou plus exactement du polyester armé de fibre de verre.

Depuis plus de six années la firme liégeoise (dont le siège se trouve plus précisément à Blégny-Trembleur) s'est spécialisée dans les techniques de mises en oeuvre de ce matériau..

Elle a produit, outre le coupé 2+2 déjà cité, un modèle de voilier, des trémies pour bétonnières, des carénages de motos de courses, une carrosserie pour habiller de verre la Triumph Spitfire, des modèles de bolides de Formule V et un véhicule tout terrain.

 En Formule V le palmarès de la marque est impressionnant : les trois premières places aux 12 Heures de Huy en 1964,  la première dans Liège-Anvers-Liège deux ans plus tôt, deux fois la première place au Nurburgring en 1965, cinq fois la première place sur circuit en Belgique l'année suivante,  quinze victoires en courses de côte. Plus de 150 de ces bolides ont été produits et vendus dans tous les pays d'Europe. Ils sont fabriqués sous licence en France et en Grande Bretagne.
Un mot aussi de la tout terrain. Il s'agit d'une double coque en polyester armé moulé d'une seule pièce et monté sur un châssis métallique : il est des tiné a être équipé de n'importe quel élément VW.




4,25 m x 1,75 m
x 1,04 m

Pour décrire honnêtement la nouvelle GT, il faut commencer par en dire ce qu'on ne voit pas.
Elle  a été construite suivant un principe tout nouveau étudié depuis 18 mois à Liège. (A noter que la firme Bayer suivant le même principe a sorti un proyotype pour le compte de BMW qui est le fruit de 6 années d'études, évènement qui fut salué à grand tapage il y a quelque cinq mois pour toute la presse spécialisée d'Outre-Rhin).
Faute de crédits, le modèle Apal a été terminé avec huit mois de retard sur le planning théorique.
La voiture est constituée essentiellement d'une double coque en polyester armé assemblées par collage et dans les caissons de laquelle a été injecté par émulsion du polyuréthane rigide. Un petit châssis rigide à l'avant supporte le train avant et un deuxième châssis à l'arrière maintient le groupe propulseur. Le moteur occupe une position centrale, juste derrière l'habitacle dont il est séparé par une épaisse paroi formant isolant acoustique. Conçue de cette façon, la nouvelle Apal offre la particularité d'avoir son centre de gravité coïncidant à peu près avec son centre géométrique.De plus ses dimensions lui promettent une tenue de route absolument exceptionnelle : pour une longueur de 4,25 (soit à peu près celle de la Coccinelle VW), elle a une largeur de 1,75 (comme une américaine) et une hauteur de 1,04 m à peine.
Elle pourra être équipée dans l'immédiat par le moteur de la VW 1600 TL ou celui de la Porsche 912, lui assurant vraisemblablement des vitesses de pointes respectivement de 175 et 200 km/h et plus. Son poids à vide ne dépassera pas les 680 kg avec moteur VW !
Extérieurement, que peut-on en dire?
Sa ligne s'apparente vaguement avec celle de la Chaparral : soit un avant d'aspect frêle et un arrière puissant.



Le capot s'imbrique entre deux ailes formant saillie et comportant deux phares (à iode) protégés par une coquille de plexiglas. Elles sont surmontées de deux rétroviseurs en obus avec feux clignotants incorporés. Le pare-choc est symbolique (il est vrai qu'il n'est guère nécessaire, vu la résistance exceptionnelle du polyester armé aux chocs).Le pare-brise (teinté) s'incline fortement vers le capot et est balayé par une paire de solides essuie-glaces. Les deux portières sont larges et permettent un accès relativement aisé à l'habitacle. Le toit, amovible, est de petite dimensions, et peut être logé dans le coffre à bagages.



L'arrière de l'habitacle est constitué d'une lunette étroite et inclinée d'arrière en avant. Puis vient la caisse arrière, fermée par un énorme couvercle, donnant accès à un coffre à bagages d'une capacité de 250 décimètre-cubes. Un second couvercle donne accès au moteur logé, nous l'avons dit, en avant du train arrière, juste derrière l'habitacle. De part et d'autre de la caisse arrière on trouve deux grands bouchons de réservoirs (celui-ci est double et d'une capacité de 60 litres). L'arrière, coupé net à la verticale se caractérise par une belle sobriété : les batteries de feux proviennent d'Allemagne et sont destinées normalement par son constructeur à équiper des camions ! Comme à l'avant, le pare-choc est constitué d'une mince baguette métallique enserrant un bourrelet de caoutchouc plus mince encore. La même baguette court d'ailleurs le long des flancs.



A noter également les jantes aluminium et dessinées par Apal (tout comme les bouchons de réservoir). Des ailettes permettent le refroidissement des freins. Ceux-ci, à double circuit, sont à disques à l'avant et tambour à l'arrière.





Une balle de ping-pong



Le dernier modèle Apal a une ligne d'une originalité indiscutable. Mais le matériau dont elle est faite l'est bien davantage. Il n'est pas inutile de dire en quoi consiste le polyester armé et d'en donner les caractéristiques les plus marquantes.
Une carrosserie en polyester armé se façonne à partir soit de tissus de fibre de verre, soit de "mat", sorte de feuille mince où les fibres sont disposées un peu dans le même sens, soit de couches de tissus ou de mat superposées. Cette fibre de verre est enduite de résine synthétique (polyester) stratifiée à l'aide d'un catalyseur. Il est évident que ce procédé rend possible un façonnage (qui ressemble un peu au travail de la couturière et de la modiste réunies!) qui supprime la nécessité de remplacer les presses à emboutir et les matrices coûteuses utilisées dans la fabrication de carrosserie métallique. Presses et matrices sont remplacées par des moules.
De plus la fibre de verre étant plus résistante que l'acier, la solidité d'une pièce moulée en polyester armé est sensiblement plus grande que celle d'une pièce en acier embouti. Des essais ont été exécutés à l'Université de Liège en vie d'établir une comparaison entre les propriétés de résistance à l'impact de balles de guerre tirées à 200 m; Une couche de polyester armé de 6 mm offrait la même résistance qu'une plaque de blindage en acier de 1 cm d'épaisseur.



De plus, à l'inverse des voitures carrossées en fibre de verre par les Anglais qui emploient essentiellement du "mat", Apal se sert de tissus et évite par le fait même de l'éclatement de la carrosserie en cas d'accident, le tissus offrant une résistance égale dans tous les sens.
Nous avons vu la jante d'une roue de secours logée sous le capot avant d'une Apal 2+2 qui avait heurté un angle vif d'un poteau de béton à 90 km/h. cette jante, témoignant de la violence du choc, avait pris la forme d'un huit. Or, la voiture a pu parfaitement être réparée pour une somme relativement modique, et chose essentielle, son conducteur s'en ai tiré avec quelques égratignures à la tête. Cela s'explique par le fait que loin de s'enrouler autour d'un obstacle heurté à grande vitesse, comme c'est la cas de la voiture construite en acier, la voiture en fibre de verre, plus élastique et plus résistante a tendance à rebondir comme le ferait une balle de ping-pong. Les accrochages légers se soldent du reste généralement par quelques égratignures dans la peinture, les volumes de carrosserie reprenant leur forme après l'impact. En cas de déchirures ou de trous, il suffit de coller une pièce galbée dans l'orifice qu'on lui aura ménagé et à dimension, et la réparation est faite.


Une brillante équipe


La nouvelle GT Apal est le fruit d'un brain-trust de quatre cerveaux !
Elle a été entièrement conçue et construite dans l'atelier de la firme, endroit pittoresque où voisinent divers prototypes, l'un ou l'autre ancêtre (on a le culte de la voiture ou on ne l'a pas) et un piano mécanique !




Elle est l'oeuvre d' M. Edmond Pery qui dirige l'entrprise avec M.Bruno Vidick, chargé de la direction commerciale, de M. Christian Devillers, modeleur et de M.Vandenbosch d'Anvers qui ne fait pas partie des 18 membres du personnel et qui a concrétisé par le dessin les conceptions des inventeurs liégeois.
M. Pery, qui à l'âge de 38 ans est à peu près le doyen de la firme s'est acquis une vaste expérience dans l'art du carrossier. Il a enseigné en effet cette discipline dès l'âge de 22 ans et peut se targuer, entre autres, d'avoir habillé d'acier tel modèle spécial en travaillant uniquement au marteau !
Son contremaître, Sam Jeuris, à qui la firme doit pour une très large part la mise au point de son véhicule utilitaire ( d'où le nom de Samtrack qui lui a été donné) est l'homme orchestre. Hors-profession, il s'intéresse à l'archéologie du Moyen-orient, est photographe et conférencier. C'est aussi un(ex)rallyman qui a disputé maintes épreuves majeures.
On pourrait ainsi énumérer les talents de toute l'équipe de Blégny-Trembleur et aller de surprise en surprise. Qu'il suffise de juger l'arbre à ses fruits : la Samtrack, la GT (qui ne recevra son nom qu'à l'ouverture du salon et qui pourrait bien s'appeler Navaja) ne seraient pas les véhicules ingénieux et originaux si leurs créateurs n'avaient pas les mêmes qualités.
Ces artisans se mueront bientôt en industriels, puisque le terrain de leur future usine est d'ores et déjà choisi
Nul doute que d'ici quelques années le panorama de l'industrie automobile en b Belgique sera modifié et d'une manière telle que le prestige de notre pays ne saurait
en souffrir....






26/04/2011
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